Oberhalb der Erde ist viel Wald und ein See. Unter der Erde ist ein Plan von Gängen angelegt

Dur comme du granit ?  La solution d’enfouissement des déchets radioactifs finlandais.

Olkiluoto

Traduction de Gaël Frionnet, étudiant en licence LEA Anglais-Allemand à l’Université de Picardie Jules Verne (2024)

Sous la petite péninsule d’Olkiluoto, au large de la côte ouest de la Finlande, à 430 mètres de profondeur dans la roche granitique, les déchets nucléaires de la Finlande doivent rester enterrés pour toujours. Depuis 2004, le premier dépôt définitif au monde de déchets nucléaires hautement radioactifs y est en cours de construction.

Photo : 50 kilomètres de tunnel. Voilà à quoi ressemblera le dépôt de déchets nucléaires finlandais.  Crédits : Posiva/Maisemassa Toinen

« Onkalo », ou en français « petite grotte » : tel est le nom donné à son projet par l’entreprise énergétique finlandaise Posiva. Un euphémisme, comme le montrent les dimensions de cette « petite grotte » : les tunnels et les puits souterrains s’étendent aujourd’hui déjà sur plus de 10 kilomètres à travers la roche, et 40 kilomètres supplémentaires sont prévus dans les années à venir. L’exploitant souhaite commencer à stocker les déchets nucléaires à partir de 2025 environ. Jusqu’à 5 000 tonnes de matières hautement radioactives devront alors être protégées du reste du monde pendant au moins 100 000 ans : c’est le temps qu’il faudra pour que le rayonnement de tous les éléments contenus dans les déchets nucléaires revienne à un niveau inoffensif.

La recherche d’un lieu de stockage a commencé avant la mise en service de la première centrale

Les Finlandais étaient manifestement conscients qu’un tel projet monumental ne pouvait pas sortir de terre – ou plutôt s’enfouir dans le sol – en l’espace de quelques années. En effet, dès 1970, sept ans avant la mise en service de la première centrale nucléaire en Finlande, le gouvernement finlandais a commencé à chercher des moyens d’éliminer les déchets radioactifs : les congeler dans les glaciers polaires, les immerger dans la mer, les envoyer dans l’espace à l’aide d’une fusée… Diverses options ont été envisagées, mais toutes ont été rejetées en raison de leur manque de praticabilité. La seule solution au problème des déchets nucléaires était l’enfouissement dans des roches stables, loin sous la surface de la terre. Dans les années 1980, la recherche de sites de stockage appropriés a commencé dans toute la Finlande.

À peu près au même moment, la Suède et l’Allemagne ont entre autres également commencé à explorer des emplacements potentiels. Mais contrairement à la Finlande, les deux pays exploitaient déjà des centrales nucléaires depuis plus de dix ans, sans avoir préalablement clarifié la question du stockage définitif des déchets hautement radioactifs.

Exigences élevées quant à l’emplacement du dépôt final

Afin de garantir que les substances radioactives puissent être stockées en toute sécurité à un seul endroit pendant des centaines de milliers d’années sans mettre en danger l’environnement, les potentiels sites de stockage définitifs doivent remplir certaines conditions. Les exigences sont particulièrement élevées en ce qui concerne la roche dite hôte, dans laquelle le dépôt doit être installé.

Elle doit être résistante et durable, afin que ni les ravages du temps, ni les tremblements de terre ou autres catastrophes naturelles ne puissent l’endommager. Elle doit également être aussi imperméable que possible à l’eau et aux gaz, et ne doit présenter aucune fissure. Cela doit d’une part garantir que les conteneurs de stockage des déchets ne commencent pas à rouiller après quelques années dans la roche, et d’autre part, empêcher une contamination radioactive de la nappe phréatique en cas de problèmes avec ceux-ci. Étant donné que les déchets radioactifs émettent également des quantités de chaleur importante, la roche doit en outre être résistante à celle-ci et, dans l’idéal, être capable de bien la dissiper.

Seuls trois types de roches entrent en ligne de compte pour un stockage définitif

Seuls trois types de roches répondent le mieux à ces exigences : l’argile, la roche saline et le granit. Cependant, aucune ne remplit toutes les conditions de manière égale.

  • La roche argileuse est facilement déformable, de sorte qu’en cas de tremblement de terre aucune fissure ne puisse se former. De plus, elle est peu soluble dans l’eau et possède la capacité d’absorber les particules radioactives. Par rapport à d’autres roches, l’argile est cependant moins stable et dissipe mal la chaleur.
  • C’est là en revanche un atout de la roche saline. C’est un très bon conducteur de chaleur et elle est encore plus malléable que l’argile. Mais comme l’a déjà prouvé le site de stockage de déchets nucléaires d’Asse en Basse-Saxe, la solubilité de la roche dans l’eau peut poser de gros problèmes. Là-bas, à la suite d’infiltrations d’eau, 130.000 barils de déchets radioactifs doivent désormais être retirés d’une ancienne mine de sel.
  • La dernière des trois roches, le granit, se caractérise particulièrement par sa grande stabilité et sa résistance, mais elle est plus susceptible de former des fissures ou même des crevasses. En revanche, elle est très résistante à la chaleur et peu soluble dans l’eau. En bref, il existe de bons candidats, mais pas de candidats parfaits pour un dépôt définitif.

La roche seule ne suffit pas à faire un bon emplacement

Les avantages et les inconvénients d’une roche sont toujours influencés par les autres caractéristiques d’un site. Son adéquation doit donc être évaluée en fonction de nombreux autres facteurs : le site se trouve-t-il dans une zone sismique ? Y a-t-il des volcans à proximité ? Où s’écoule la nappe phréatique ? Comment le climat va-t-il évoluer au cours des prochains millénaires ? Toutes ces questions doivent être prises en compte.

Le gouvernement finlandais choisit Olkiluoto comme site d’enfouissement

Après l’évaluation des sites sur la base de ces critères et de nombreux autres, il ne restait plus que quatre lieux possibles en Finlande en 1990, dont l’île d’Olkiluoto, qui se distingue particulièrement par son emplacement isolé et par la robustesse de son sous-sol granitique. De plus, les deux plus grandes centrales nucléaires finlandaises avaient déjà été mises en service sur l’île dans les années 1980, de sorte que de longs itinéraires de transport ne seraient pas nécessaires pour les déchets nucléaires qu’elles produisaient.

Le gouvernement finlandais a donc opté définitivement pour ce site dès 2000. La Finlande est ainsi de loin le premier pays au monde à choisir un site de stockage définitif. Dans d’autres pays, les recherches se poursuivent encore plus de 20 ans après. En Allemagne, par exemple, la décision ne devrait pas être prise avant 2031. La différence cruciale : contrairement à l’Allemagne, la Finlande n’a jamais cherché le meilleur site possible, mais seulement un site approprié.

 

La Finlande s’en tient à l’énergie nucléaire pour le moment

Depuis, le projet n’a fait l’objet que de critiques très isolées. Autour du site d’Olkiluoto, cela est probablement dû au fait que TVO, une société mère de l’exploitant Posiva, est le plus grand employeur de la région et assure une grande partie de ses recettes fiscales. Mais dans le reste du pays aussi, les Finlandais sont nettement plus favorables à l’énergie nucléaire que la population de nombreux autres pays européens. Personne en Finlande n’envisage pour l’instant de sortir du nucléaire.

Bien au contraire : outre les deux réacteurs nucléaires existants à Olkiluoto, un autre devrait être mis en service en 2022, et d’autres sont en cours de construction ailleurs. Mais la Finlande ne mise pas non plus sur l’électricité nucléaire à long terme. Selon le gouvernement finlandais, l’énergie nucléaire constitue plutôt une technologie de transition qui permettra au pays d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2035. Jusqu’à ce que les énergies renouvelables soient suffisamment développées, l’énergie nucléaire doit rester dans le mix énergétique en remplacement des énergies fossiles, déclare la Première ministre finlandaise Sanna Marin.

Le dépôt ne sera définitivement scellé que dans 100 ans

Cette stratégie a également été prise en compte lors de la conception du dépôt d’Olkiluoto : actuellement, l’exploitant prévoit de maintenir le dépôt ouvert jusqu’en 2120, afin que les déchets radioactifs, principalement des barres de combustible provenant des centrales nucléaires finlandaises, puissent y être déposés d’ici là. Si le délai doit être aussi généreux, c’est que les barres de combustible hautement radioactives issues des réacteurs nucléaires doivent d’abord être stockées en surface pendant environ 40 ans. Ce n’est qu’après cette période que les barres de combustible seront suffisamment refroidies et auront perdu une partie suffisamment importante de leur puissance de rayonnement pour pouvoir être transférées dans le dépôt. Ainsi, d’ici à ce que la Finlande arrête définitivement ses réacteurs nucléaires dans un avenir indéterminé, de nouveaux déchets continueront à être produits, lesquels ne pourront être stockés dans le dépôt définitif que 40 ans plus tard.

Le dépôt doit également rester ouvert afin qu’il reste possible d’y récupérer les déchets enfouis au cours des 100 prochaines années, par exemple s’il s’avérait inadapté pour des raisons inattendues ou si des méthodes révolutionnaires de traitement des barres de combustible étaient découvertes.

Plusieurs barrières sont destinées à sécuriser les déchets nucléaires

L’année 2120 étant encore loin, la question la plus importante à l’heure actuelle est la suivante : comment stocker en toute sécurité les déchets hautement radioactifs sous terre ? Pour ce faire, l’exploitant prévoit un système composé de plusieurs barrières de protection complémentaires. La barrière la plus grande et la plus importante est bien entendu le site d’enfouissement lui-même : les géologues estiment l’âge de la roche dans laquelle « Onkalo » a été construit à environ deux milliards d’années. Rien n’a changé ici depuis des millions d’années et rien ne changera pas non plus à l’avenir, affirme l’exploitant Posiva. La région aurait également déjà survécu à de nombreuses périodes glaciaires par le passé.

Avant que les barres de combustible ne commencent leur trajet du stockage provisoire en surface vers la « petite grotte », elles passent par une installation de conditionnement des déchets spécialement conçue où elles sont encapsulées quatre par quatre à l’intérieur de conteneurs en fonte de plusieurs tonnes. Celui-ci est ensuite entouré d’un autre récipient en cuivre de cinq centimètres d’épaisseur pour le protéger de la corrosion. Les conteneurs sont ensuite descendus à 400 mètres de profondeur dans le stockage définitif. Là, chaque conteneur dispose de son propre forage dans une des plus de 100 chambres du système de tunnel. Les espaces libres autour de chaque conteneur sont ensuite remplis de bentonite, un mélange de différents minéraux argileux capable d’absorber de grandes quantités d’eau. Lorsque tous les trous d’une salle sont occupés, la salle entière est également remplie de blocs de bentonite comprimée. La vidéo de l’exploitant Posiva montre à quoi cela ressemblera.

[Video]

Animation par ordinateur du futur site d’enfouissement.

Capture d’écran : YouTube/Posiva Oy. Voir sur YouTube

De nombreuses questions restent encore sans réponse

Il est actuellement difficile d’évaluer dans quelle mesure ce système fonctionnera dans la pratique. Personne ne peut savoir comment les conditions évolueront au cours des 100.000 prochaines années. Les scientifiques tentent certes déjà de reproduire le mieux possible les conditions de stockage dans un des tunnels, afin de tester par exemple la résistance à la rouille des conteneurs en cuivre. Cependant ces essais ne durent que depuis 20 ans, soit une fraction de la durée de stockage nécessaire. Beaucoup de choses sont donc basées sur des simulations informatiques et des modèles de prévision scientifiques.

Par exemple, la question de savoir si la Finlande connaîtra une nouvelle ère glaciaire dépend en grande partie de la capacité de l’humanité à réduire ses émissions de gaz à effet de serre selon les experts : si les émissions restent à leur niveau élevé actuel, probablement que la Finlande y échappera. Cependant, si les émissions diminuaient dans les prochaines années au rythme souhaité, une couche de glace massive pourrait se former au-dessus du dépôt dans 50.000 ans déjà, ce qui pourrait endommager la roche. La « petite grotte » fera-t-elle ses preuves en Finlande ? Nous ne le saurons probablement jamais. Car la demi-vie* des déchets nucléaires dépasse de loin la nôtre.

*La demi-vie correspond au temps requis pour que la moitié des atomes se désintègre complètement.

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